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samedi, mai 20 Paris, je t'aime
Cannes c'est formidable... Mais parmi tous les films pr�sent�s, il y en a un dont j'attends avec impatience la sortie en France, c'est Paris Je t'aime. Bon! D'abord parce que j'aurais pu aussi bien prendre � mon compte cette d�claration, et aussi parce que tout ce que je lis ici et l� me donne une furieuse envie de m'en repa�tre. Je respire cette ville par tous les pores de ma peau et si, tr�s souvent, elle m'exasp�re, d�s que j'en suis �loign� quelques temps, ce qui je le confesse m'arrive assez souvent, j'�prouve une inexplicable nostalgie en �voquant ses trottoirs, ses embarras, ses mille et une aventures, minuscules trag�dies et imperceptibles com�dies burlesques.
Patience donc, Il faudra attendre sagement le 21 juin.
D'ici l� quelques liens :
. Le Temps . l'huma . Cin�movies
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vendredi, mai 19 Les myst�res du Code de Leonard de Vinci
Le mus�e du Louvre organise des visites sur le th�me du livre de Dan brown, le Da Vinci Code, et du film qui en a �t� tir� et vient d'�tre pr�sent� � cannes.
Sage d�cision prise par le Mus�e d'accompagner le mouvement plut�t que de tenter de se mettre en travers, il n'est d'ailleursq que d'observer les tr�s nombreux visiteurs qui d�ambulent dans les salles du mus�e avec des parcours polycopi�s sur le th�me exclusif du roman pour comprendre que toute r�sistance est d�sormais inutile.
Rendez-vous! Je me suis rendu et j'ai donc suivi la visite.
Ce trop court survol propos� par notre charmante conf�renci�re permet non seulement de se replonger avec d�lices dans quelques chap�tres du best-seller, pourquoi nier son plaisir, mais aussi, et c'est bien l� l'essentiel, de d�couvrir ou red�couvrir au passage quelques oeuvres majeures d'artistes incomparables.
La pyramide �lev�e par l'architecte sino-am�ricain Ioeh Ming Pei d'abord. Elle serait compos�e de 666 losanges ou triangles de verre, le nombre 666 �tant bien entendu associ� avec le chiffre de la B�te, le diable pour faire vulgaire, depuis l'Apocalypse de l'ap�tre Jean (13/18), celui que l'on confondra dans la C�ne de L�onard de Vinci avec Marie Madeleine... vous voyez o� je veux en venir?...
Le probl�me, c'est qu'il y a un peu plus de 666 �l�ments, 673 exactement et si on rajoute ceux qui occuperaient l'entr�e de la pyramide si elle n'existait pas, je vous demande un peu, il faudrait encore en ajouter 11. Les partisans acharn�s de la signification �sot�rique de lieu triomphent tout de m�me car, disent-ils, 684 cela fait exactement 666 + 18 et 18 comme chacun sait c'est 6 + 6 + 6... (Merci Wikip�dia, providence des internautes).
Les m�daillons nord sud d'Arago
Quand vous grimpez quatre � quatre les marches qui conduisent � la grande Galerie, en essayant de ne pas vous faire bousculer par les participants du 5257�me rallye consacr� � l'oeuvre de Dan Brown et qui eux aussi convergent vers les m�mes points de rendez-vous, vous tombez �videmment sur le m�daillon de bronze Nord-Sud dit d'Arago qui suit le trac� du m�ridien de Paris.
Il fallait �a pour ne pas laisser tomber dans l'oubli ce m�ridien autrefois c�l�bre et � partir duquel on calculait les positions avant que les anglo-saxons, fort de leur supr�matrie navale, on l'a bien vu � trafalgar, n'op�rent un hold-up cartographique en faveur de celui de Greenwich. Arago, donc, math�maticien, physicien et astronome, recalcula avec pr�cision le trac� du m�ridien. En 1994, le sculpteur Jan Dibbets remporta le concours organis� par la ville et le minist�re de la culture et planta donc ses 135 m�daillons, dont le centre serait lObservatoire.
Mais dans le Da Vinci, cette ligne permet aussi de remonter jusqu'au Graal et son trac� n'a plus rien de scientifique. Le m�ridien ne serait qu'un pr�texte pour dissimuler sa v�ritable nature : un extraordinaire parcours fl�ch� destin� aux initi�s. Bon, d'accord, on se demande un peu pourquoi les initi�s ont besoin d'un aussi monumental pense-b�te, mais enfin, la m�moire c'est comme tout, cela diminue avec les ann�es, initi� ou pas. Donc, je suis initi�, je ne me souviens plus tr�s bien comment retrouver le parcours initiatique qui permet d'acc�der au grand secret que prot�ge le prieur� de Sion, et hop je suis peinard, les plaques laitonn�es du m�ridien de monsieur Arago sont l� pour me guider.
Quant au jeune lecteur fanatique de harry Potter qui m'a sugg�r� qu'Arago serait le diminutif de l'araign�e Aragog et que les m�daillons seraient les points de croisement d'un vaste toile d'araign�e plaqu�e sur Paris par l'Opus Dei, je reste tr�s sceptique...
 Un des 135 m�daillons de bronze d'Arago
Cette ligne passerait au beau milieu de l'�glise Saint Sulpice. En fait, elle passe "non loin", mais qu'importe. Et que trouvons-nous dans cette �glise? Un tr�s curieux instrument scientifique destin� � calculer l'heure exacte des �quinoxes. Drole d'endroit pour un tel appareillage, l'Eglise ne nous ayant pas habitu� � faire si bon m�nage avec la science, d'autant que l'instrument, ou plutot la sph�re qui le surmonte et qu'on nomme le gnomon, et qui sert � r�fl�chir les rayons du soleil, est justement juch� un ob�lisque... d'o� s'�chappe une �troite lani�re de m�tal sertie dans le marbre de l'�glise. Quand le soleil qui p�n�tre par les vitraux, tombe sur le gnomon et suis exactement la lani�re de m�tal et �claire pile poil la dalle... vous ne gagnez rien mais vous ressentez la m�me joie qu'au fond du temple d'abu-Simbel quand R� �claire le visage de pharaon. Dr�le d'endroit donc, sauf quand on sait que l'instrument servait aussi � calculer la date pr�cise de P�ques. La d�termination pr�cise dans chaque pays du d�but du ramadan ne se pratique pas autrement.
Mas revenons donc au Louvre et � la grande galerie.
 Tom Hanks (Robert Langdon) et Audrey Tautou (Sophie Neveu) d�couvrant le corps du conservateur
C'est l� qu'� travers la herse qui fermerait la salle carr�e et la grande galerie (pas de herse en vue mais un simple habillage de bois) fut tu� le conservateur du mus�e alors qu'il venait de quitter son bureau (pas de bureau non plus, mais derri�re la seule porte qui pourrait y donner accc�s : la galerie d'Apollon! Superbe, il faut la visiter!). Le pauvre homme tomba les bras en croix et les jambes �cart�es, dans la position de l'homme de Vitruve dessin� par L�onard, juste devant les tableaux du Caravage, soit � au moins deux cent m�tres. Un peu loin, tout de m�me.

C'est l� qu'intervient le code secret cens� donner acc�s aux myst�res de la vie de j�sus, la fameuse suite de Fibonacci. Ce code fut utilis� quelques jours pendant la premi�re mondiale, mais ayant �t� d�crypt� tout de suite, il fut abandonn� promptement. On avait mieux � faire pour s'entretuer que de s'adonner � des jeux pu�rils. J'ai lu attentivement la th�orie math�matique de la chose ici et effectivement cela m'a paru enfantin...

Les tableaux r�f�rents se succ�dent : la Vierge aux Rochers de L�onard de Vinci d'abord. Composition pyramidale, encore, confusion entre les deux enfants, jean-Baptiste et J�sus, dont l'un prie et l'autre b�nit, alors que la vierge tient le premier et prot�ge le second... Et que fait donc cet archange, l'archange uriel, avec son doit tendu, d�signant l'enfant qui prie et non celui qui b�nit? Et la main de la Vierge coiffe-t-elle vraiment la t�te invisible d'un autre enfant que l'archange couperait de son doigt pint� comme un couperet?
Historia a donn� une tr�s bonne analyse de ce tableau ici.
Et vous, comment va votre scotome? Vous ne savez que r�pondre? Le scotome est d'abord une maladie de l'oeil, qui alt�re la vue d'un individu dans une fraction imit�e de son champ de vision. Bref, on regarde mais on ne voit pas ce qu'on regarde, en face ou sur le c�t�, cela d�pend des l�sions. En peinture, cela d�signe une chose peinte mais que l'observateur du tableau ne voit pas, m�me en ayant l"oeil riv� dessus. Cela renvoie �videmment aux th�ories des formes cach�es, � la gestalt, aux magnifiques st�r�ogrammes qu'il faut regarder en laissant d�river lentement sa facult� d'accomodation comme les magnifiques images ici.
En psychanalyse, c'est tout ce dont l'insconscient a conscience sans que la conscience veuille l'admettre... Evidemment, je caricature... Mais finalement c'est mon droit, j'ai tellement �t� accus� d'avoir eu des probl�mes avec mon p�re dans ma petite enfance que, scotome ou pas, j'en profite pour d�clarer hautement que je m'en fiche.
Un scotome on en retrouverait dans le tableau de L�onard de Vinci, "la mort de la Vierge". C'est en effet ce tableau qu'aurait d�croch� pour d�clencher l'alarme et faire descendre cette fameuse herse, Jacques Sauni�re, le dit conservateur avant de mourir. Exploit pour un mourant autant que pour un homme en bonne sant�, puisque le tableau en question mesure plus de 3,50m sur 2,50 et que le cadre � lui seul doit peser un bon poids...

Il y aurait donc un scotome dans ce tableau, repr�sentant, chose impensable pou l"�poque, la vierge comme une morte tout � fait humaine et tout � fait morte : visage livide, raideur cadav�rique. Il faut dire que le caravage avait pas� plusieurs heures � crayonner le corts d'une jeune noy�e. Mais en regardant en haut du tableau, le voile qui semble s�lever dans le ciel rappelle exactement la couleur de la robe de la vierge morte, tout comme le cordon celui du corsage, et serait donc l'image "scotomis�e" de sa mont�e au ciel. Voil� donc qui nous r�concilie avec cette mort, pas assez "dormition" au go�t des pr�lats qui avaient command� l'oeuvre au peintre pour la refuser ensuite, tr�s choqu�s de voir que cette mort repr�sentait bien un d�c�s... Jamais content.
Notons d'aileurs, ce qui n'a rien � voir, que l'�glise d'alors, premier sponsor des artistes, n'avait gu�re de probl�me avec la nudit�, comme en temoignent les angelots, saints, martyrs et martyres qui nous d�voilent sans beaucoup de pudeur des chairs app�tissantes ou sanguinolantes ou les deux. L'anatomie de Saint S�bastien a vu fantasmer des g�n�rations d'adolescentes, au moins autant que, vus du dessous, les attributs sexuels de David � Florence.
Revenons � notre conservateur et � sa tentative d�sesp�r�e. Il est plus vraisemblable que ce soit le tableau � c�t� de celui de la mort de la Vierge qu'il ait soulev�. Un Caravage toujours mais de dimension plus modeste et int�ressant par son sujet, puisque c'est le portait du grand ma�tre de l'ordre de Malte, Alof de Wignacourt. Int�ressant, parce que l'histoire du Prieur� de Sion, cens� pour Dan Brown prot�ger le secret du mariage et de la descendance du Christ, est calqu�e en tous points sur l'histoire, v�ridique celle-l�, de l'ordre de Malte. Le Caravage fit partie de cet ordre, mais pas tr�s longtemps. Sa libert� de ton, ses moeurs, m�me pour l'�poque, ne pouvaient lui valoir que des ennuis : on l'emprisonna, on le d�chu de son appartenance � l'odre et on le chassa de Malte, ce qui est un moindre mal...
Notre petite visite s'ach�ve avec la toile la plus grande du mus�e du louvre, les noces de Cana de V�ron�se (6,66 x 9,90 m�tres, il faut un grand salon et celle-l�, inutile d'essayer de la d�crocher!).

C'est vrai que les �poux officiels font un peu p�le figure, rel�gu�s dans le coin gauche du tableau. C'est vrai aussi que c'est J�sus qui y tient la place centrale et qu'il s'y tient aux c�t�s d'une femme qu'on a dit �tre Marie Madeleine... Bon. Mais en examinant de plus pr�s le tableau, on voit que la dite Marie Madeleine semble assez �g�e, ce qui milite tout de m�me en faveur de la m�re de J�sus, et triste ce qui s'expliquerait par l'�vocation du futur sacrifice de son fils, symbolis� par la petite saynette au-dessus de la balustrade et montrant des serviteurs d�coupant de la viande pour les convives tandis que le sang de l'animal (un agneau?) s'�coule et est recueilli dans une fiole.
  
Et puisqu'on parle d'interpr�tation ou de manipulation des oeuvres d'art, je ne saurais mieux faire que de vous renvoyer � l'excellente analyse de Marianne Serra de l'�cole du Louvre, justement, l"Evaluation de l?utilisation du num�rique dans l?enseignement de l?histoire de l?art" et qui nous montre deux versions de cette fameuse toile des noces de Cana, originale et retouch�e...
Un r�sum� en quelque sorte du destin de tous les indices mis en sc�ne par Dan Brown pour son livre.
Mais comment lui en vouloir quand on voit tous ces gens, jeunes et moins jeunes, arpenter Paris, ses �glises et ses mus�es. La contemplation des grandes oeuvres, m�me s'il ne s'agit au d�but que d'y d�busquer les indices �voqu�s dans un thriller, est une activit� hautement salutaire pour l'esprit et son ouverture. Il y a tant de gens, de r�gimes ou de pays qui militent pour les br�ler, ces livres et ces oeuvres d'art... Pour une fois que l'occasion nous est donn�e de les rechercher avidement et de les analyser fi�vreusement...
Allez, tiens, puisqu'on a parl� de la C�ne de L�onard de Vinci et de la pol�mique sur la pr�sence de Marie Madeleine � la place de l'ap�tre Jean, je ne r�siste pas � l'envie de reproduire encore une fois la magnifique publicit� de Fran�ois et Marith� Girbaud...

NB - On me signale que la bande annonce du Da Vinci Gode est une supercherie... Dommage, elle m'avait bien fait rire!
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