(15 Août 2002)
Le phénomène a
été plusieurs fois observé et semble se
dérouler chaque fois selon le même scénario.
Cela débute plutôt bien, un matin ordinaire, avec
café au lait et tartines, discussions banales, projets
de vacances...
Peut-être un peu de familiarité inattendue, des
petits gestes trop tendres, des attitudes ambiguës, mais
rien de précis... Quoi de plus normal qu'un peu de tendresse,
je vous le demande?
C'est la nuit venue, que cela se gâte.
La jeune maîtresse de notre
pauvre plantigrade semble tout mettre en oeuvre pour lui faire
perdre la tête: nuisettes , tenues provocantes, câlins
insistants... Alors, forcément, vient le moment où
notre ourson se prend soudain pour un gros grizzli sauvage.
La fête peut durer plusieurs
jours, avec ses instants de complicité, ses débordements
inattendus, ses phases de repos très agréables.
Pas un ours, quelque soit la
couleur de sa panse, ne me démentira, la vie palpite alors
de mille plaisirs, d'émerveillements infinis, de sensations
indescriptibles. Etre ainsi le centre de tous les intérêts,
l'objet de toutes les attentions, le préféré,
le chouchou, le protégé, cajolé, caressé,
étouffé sous les bisous, pressé de toutes
parts, de nuit comme de jour, sans cesse...
Cela est vraiment trop beau,
n'est-ce pas?
Et bien oui, c'est en effet trop
beau et le drame survient, inéluctable.
Un jour, comment dire, notre
ours intéresse moins. Il semble faire un peu partie des
meubles. On s'en occupe encore, mais plus par habitude que par
véritable passion. Il faut bien se rendre à l'évidence,
le quotidien tue lentement la folie des débordements d'hier,
la lassitude s'installe, le train-train débarque.
Vient la punition ultime,
l'isolement. Cela peut-être la cave, ou le grenier, la
salle de bains où il passera de longues heures, enfermé,
seul, avant que dans un élan incompréhensible,
on tente de se faire pardonner cet abandon par de sauvages embrassades.
Sauvages mais éphémères et sans lendemains.
Le silence s'installe bientôt.
C'est maintenant patent, l'ours ennuie.
Bientôt, il gêne
et cela conduit inévitablement à des explosions
de violence, d'autant plus féroces qu'elles n'ont qu'un
but: l"élimination. Les scénarios varient,
mais suivent néanmoins une trame identique: agression
subite et mise à mort. Etouffement, strangulation, arme
blanche, noeud coulant, ... Rien ne rebute les tueuses d'ours...
Le drame est toujours
violent et brutal. Notre plantigrade n'a aucune chance de s'en
tirer
Ah, évidemment, après
le drame, quelques larmes sont bien versées devant la
dépouille de l'ours à qui on rend un dernier et
bien hypocrite hommage... Mais cette dernière mise en
scène est-elle bien sincère?
Ainsi va la triste vie
des ours!
(La Panse
de l'Ours remercie de leur involontaire contribution : Ashley
Judd, Martina Colombaro, Kate Moss, Milla Jojovitch, Nicole Maddox,
Maria-Carla Boscone, le photographe Helmut Newton et tous les
autres, modèles ou photographes, que nous n'avons pas
pu identifier ... )