Je suis malade. Si, si. Je sens qu’inexorablement je bascule du côté obscur de la Force…
J’essaie bien de penser à autre chose, de me dire qu’on finira par s’en sortir, mais à chaque fois, je replonge.
Hier midi, par exemple. J’étais assez content de moi.
J’avais réussi à ne pas casser ma radio en écoutant Michèle Alliot Marie, ministre des affaires étranges, très très étranges, expliquer comment, pour faire des économies, elle se balade en Tunisie dans le jet privé d’un de ses bons amis, un pauvre diable avec un pauvre jet qu’elle essaie aujourd’hui de faire passer pour une victime de Ben Ali, pauvre pèpère. Je me disais, fier de moi : c’est bien, tu tiens le bon bout, la sagesse est avec toi. Souris, emplis ton coeur de pensées positives.
Hélas, en écoutant et surtout en regardant Nicolas Sarkozy quelques heures plus tard faire son intéressant, la mine concentrée comme un comédien débutant découvrant le rôle de Iago, et annoncer que des sanctions seraient prises pour punir les dysfonctionnements ayant accompagné le sursis de Tony Meilhon, récidiviste condamné pour outrage… à magistrat, j’ai rebasculé illico du côté obscur.
Tout est bon, vraiment, même à propos d’une affaire aussi horrible, ou peut-être à cause de l’horreur qu’elle suscite, quelle aubaine!
Les magistrats du tribunal de Nantes qui se sont senti visés, on se demande bien pourquoi, ont décidé de suspendre toutes les audiences lors d’une assemblée générale associant magistrats du siège et du parquet. Est-ce que le ministère de la Justice leur témoignera la même bienveillance que le ministère de l’Intérieur en a manifesté envers les grévistes des compagnies de CRS? On ne sait pas encore…
Eux aussi, ils basculent du côté obscur (pas les CRS, les magistrats). Je me sens moins seul.
Comment se fait-il qu’on ait pu élire un gars pareil et le laisser s’entourer d’une équipe pareille? Et comment se fait-il qu’il ait encore des partisans, dont quelques uns que je respecte? Mystère. Et les juges, les associations, les enseignants, les soignants, les bénévoles, même l’abbé Pierre et Coluche depuis leur cercueil continuent quand même, vaille que vaille, à essayer d’empécher le bateau de couler, mais rien n’y fait, ce président s’acharne, et il rongera la coque avec les dents s’il le faut…
Un petit coup de haine par là (immigrés, Roms), un petit coup de rabot par ci (infirmières,subventions), un petit coup sécuritaire en bas, un petit coup de pouce à un ami à placer en haut… oui, il s’acharne et construit ses réseaux et se fait jour après jours des obligés qu’il décore, nomme, déplace, enrichit…
Heureusement que dans les Hauts de Seine, Isabelle Balkany est là pour reprendre les choses en main…
Décidément, je suis vraiment malade. Vador, Vador, au secours…