Il y a belle lurette maintenant que la ville de Venise a mis en place un système très performant d’alerte, prenant en compte la météo, c’est-a-dire la prévision d’un système dépressionnaire, celle du vent, de sa direction et de sa force, et celle des précipitations et de leur importance avec, élément déterminant quand on est au bord de la mer, les coefficient de marée qui, eux, sont connus et forment l’élément certain de la situation.
Venise le sait si bien qu’elle met en ligne un site internet accessible à tous, habitants et touristes, sur lequel on peut voir deux courbes:
– la première indique la courbe théorie des marées
– la seconde la courbe de la marée prévisible corrigée des éléments météorologiques qui s’affinent en permanence.
Outre internet, un système de sms est disponible, des sirènes se déclenchent dans toute la ville en cas d’alerte, avec un code sonore, que les vénitiens attendent et se hâtent de transformer en mesures de prévention : pose de panneaux sur les portes, installation de tréteaux, mise en place de schémas de circulation, relevage des objets fragiles, comme ce libraire qui empile ses livres dans une baignoire, etc.
Evidemment, ici la lagune empêche les vagues monstrueuses et les marées y sont modérées. Mais le vent s’y déchaîne aussi bien qu’ailleurs, la pluie également et, quand le coefficient de marée astronomique est élevé, comme la ville est au ras de l’eau, le phénomène entraîne par l’accumulation de l’eau dans le piège lagunaire des inondations régulières et plus ou moins importantes, plusieurs dizaines de fois pas an, et parfois une inondation spectaculaire, comme en 1966 ou le coefficient a atteint la cote de 196, alors qu’à partir de 140, on parle d’aqua alta exceptionnelle.
Ce qui est spectaculaire dans ce tableau de 1966, c’est de constater l’écart formidable entre le niveau théorique de la marée et celui atteint, à cause de l’effet météo (dépression, vent, pluies).
Alors que la marée astronomique était calée vers 0.50, elle a atteint près de 2 mètres, soit un facteur 4, à cause de la météo.
Ce week end, nous avons eu à la fois une marée très élevée et des conditions météos très mauvaises et l’amplification du niveau de marée, déjà très haut, a été multipliée par un facteur dévastateur.
La qualité des prévisions n’est pas en cause. Les météorologues avaient parfaitement prévu la tempête, le vent, la pluie. Le coefficient de marée était également disponible. Rien ne permettait de limiter le phénomène, mais n’était-il pas possible d’évaluer les conséquences de la conjonction des deux facteurs?
Il aura fallu le tsunami de 2004 pour que les systèmes de prévision et d’alerte soient revus et mis en place. On l’a vu avec le drame du Chili et les évacuations préventives sur toutes les côtes susceptibles d’être atteintes par la vague suivant le séisme.